Au moins 17 personnes ont été tuées et une dizaine blessées dans l’effondrement dimanche 15 janvier d’un vieil immeuble qui se situe dans le quartier de Fassouh à Achrafieh. La cause exacte de cette catastrophe n’a toujours pas été déterminée, mais la question du respect des normes sismiques a refait surface.

Photo: Joseph El-Khoury

La majorité des bâtiments érigés au Liban après la guerre civile (1975-1990) ne respecte pas les normes parasismiques, mais cela ne veut pas dire que toutes vont s’effondrer dans l’éventuel cas d’un séisme.

«La loi qui impose aux constructions le respect des normes parasismiques n’a été décrétée qu’en 2005», explique Dahlia Abdel Massih, ingénieur géotechnique au Centre national de recherche géophysique (CNRS) du Liban.

«L’application de ces normes est obligatoire pour les bâtiments qui dépassent les quatre étages et sont d’une surface de plus de 1.500 m2», ajoute-t-elle.

Personne ne peut savoir pour sûr si tous les bâtiments vont s’effondrer à Beyrouth.

A part Beyrouth et ses banlieues, la plupart des bâtiments à travers le pays ne dépassent pas cette limite. Cependant, cette loi n’est pas bien appliquée dans toutes les nouvelles constructions au Liban parce qu’il n’y a pas de suivi de la part des autorités qui accordent les permis, renchérit Abdel Massih.

«Personne ne peut savoir pour sûr si tous les bâtiments vont s’effondrer à Beyrouth, dans l’éventuel cas d’un séisme», affirme Alexandre Sursock, directeur du CNRS.

«La plupart des bâtiments du centre ville ont été construits selon des normes parasismiques, mais les conséquences d’un tremblement de terre dévastateur ne peuvent pas être supportés par le gouvernement libanais», poursuit le directeur.

Selon lui, le Liban se situe dans une zone à activité sismique modérée. «Un séisme dévastateur (comme celui de Haïti, ndlr) est très rare. Il survient chaque millénaire», précise-t-il.

 

La majorité des bâtiments érigés au Liban après la guerre civile (1975-1990) ne respecte pas les normes parasismiques.

Lors de la crise sismique survenue dans le Sud du pays, en 2008, le CNRS a enregistré plus de 800 tremblements de terre. «Bien que la plupart des habitations de cette région ne respectaient pas les normes parasismiques, nous n’avons observé que quelques fissures dans les bâtiments», reprend l’ingénieur Dahlia Abdel Massih. «Aucun ne s’est effondré», ajoute-t-elle.

Ces secousses, qui n’ont pas dépassé les 6 degrés sur l’échelle de Richter, ne sont pas comparables aux grands tremblements de terre survenus cette année à travers le monde.

L’institut d’études géologique des États-Unis (USGS) a déjà recensé 14 séismes dévastateurs (de plus de 7 degrés sur l’échelle de Richter) ces deux dernières années et plus de 225.000 morts. Seule l’année 2004 a enregistré un nombre aussi élevé dans les 30 dernières années.

«Les ingénieurs libanais ne font pas des calculs sismiques pour plus de 6 degrés», reprend M. Sursock.

«Les ingénieurs libanais ne font pas des calculs sismiques pour plus de 6 degrés».

Alexis Kalache, ingénieur civile travaillant au Liban et au Qatar, estime qu’«il faut prévoir une augmentation de 30% du prix total de béton lorsqu’on va construire selon des normes parasismiques».

«Les constructions qui possèdent un sous sol, et sont donc encastrés en terre, courent moins de risques en ce qui concerne l’effondrement», ajoute-t-il.

Pour lui, les bâtiments qui ont été construits sans respect de ces normes ne peuvent sûrement pas résister à un tremblement de terre de plus de 6.5 degrés à l’échelle de Richter.

«Sur le chantier, l’application des normes parasismiques nécessite beaucoup de calculs et de travaux supplémentaires», renchérit Hicham Khater, chargé d’affaires dans une compagnie de génie mécanique.

«Les ingénieurs veulent construire un bâtiment qui dure 100 ans donc ils ne prennent pas en considération la probabilité d’un séisme de plus de 6 degrés qui survient chaque 200 ans», poursuit, pour sa part, le directeur du CNRS.

A travers son Histoire le pays du Cèdre a été secoué violemment à plusieurs reprises. En 552 après Jésus-Christ, la capitale est détruite par un violent séisme accompagné d’un tsunami. Il aura fallu plusieurs siècle pour que la ville se rétablie.

«Personne ne peut prétendre savoir si un séisme va se produire ou non, même pas les clairvoyants», insiste M. Sursock.

«La priorité est de protéger les sociétés et non pas les bâtiments. C’est pour cela qu’il faut se concentrer sur les mesures de préventions», conclu-t-il.

Par Elie Wehbé
@Elie_Wehbe